Plus de trente ans de visitesDepuis son ouverture au public en juin 1987, le sous-marin Espadon est exposé dans le sas de l’écluse fortifiée. Lieu de visite emblématique de Saint-Nazaire, il a déjà à son compteur 33 saisons d’ouverture au public et plus de 2,7 millions de visiteurs accueillis ! Une retraite qui n’est pas de tout repos pour ce patrimoine maritime sauvé du démantèlement.
En 2017, l’équipe de l’Écomusée réalise un constat d’état du sous-marin. Espace après espace, chaque recoin est inspecté car l’Espadon est inscrit à l’inventaire des collections du musée. Conserver un tel objet est un véritable défi. Contrairement à la plupart des œuvres muséales, le public entre à l’intérieur. Plus compliqué encore, le sous-marin est exposé depuis plus de 30 ans à un air humide et salin.
Le constat est sans appel. À l’intérieur comme à l’extérieur, la corrosion fragilise certaines parties du sous-marin et menace son avenir.
Un nettoyage complet et un carénage de la coque sont nécessaires. Ce projet de restauration du sous-marin Espadon est aussi l’occasion de renouveler le parcours de visite.
En décembre 2020, le sous-marin Espadon ferme ses portes au public. Pendant près de 8 mois, une quarantaine de personnes s’active sur le chantier de restauration : professionnels du musée, experts-restaurateurs, maîtres d’œuvre, directeur artistique, équipe de carénage, métalliers…
Nous reprenons pour vous les étapes clés de ce chantier d’exception.
Dans le sous-marin Espadon, un chantier de restauration minutieux se prépare. L’équipe de la conservation du pôle Patrimoine a tout prévu : casquettes coquées, masques, gants et aussi brosses, pinceaux, chiffons… Tout est prêt pour le grand nettoyage du sous-marin Espadon. Pour atteindre les moindres recoins, des petits goupillons et des brosses à dents ont même été prévus !
Les Chantiers de l’Esclain entrent sur le chantier accompagnés par A-Corros, spécialiste de la corrosion agréé par le service des Musées de France. Ils sont chargés du carénage partiel de la coque. La première étape est le nettoyage haute pression. La coque est ensuite décapée à la brosse meuleuse. Les tôles trop abîmées sont remplacées. Sur ces interventions, trois sous-couches de peintures sont appliquées pour uniformiser l’épaisseur de la peinture finale.
Il faut faire preuve de souplesse pour nettoyer l’intérieur d’un sous-marin ! Rien ne doit être oublié : vannes, tuyaux, boutons… Avec le temps, la poussière et les graisses se sont accumulées à l’intérieur. L’équipe intervient du sol au plafond et dans les moindres recoins pour que le sous-marin retrouve son lustre d’origine.
Dans tous les compartiments de l’Espadon, des objets, documents et textiles sont exposés. Tous ont été sortis pour être triés, inventoriés et photographiés. Dépoussiérés, ils seront conservés dans les réserves de l’Écomusée ou à nouveau présentés dans le sous-marin Espadon à l’issue du chantier de restauration.
En quelques jours, l’entreprise de métallerie Ateliers David démonte la verrière qui isole le sous-marin de la route. Les passants, qu’ils soient à pied, à vélo ou en voiture ralentissent pour profiter de cette vue privilégiée.
Grande nouveauté du parcours, une passerelle métallique est ajoutée par l’entreprise Ateliers David au pied de la paroi. Les visiteurs se trouvent ainsi au plus près du nez du sous-marin !
Un point de vue impressionnant qui permet de voir l’Espadon dans toute sa longueur.
L’équipe des chantiers de l’Esclain s’attaque au massif du sous-marin. Haut de plus de 6 mètres, un échafaudage est monté pour le caréner. À son tour, il est meulé et nettoyé. C’est ensuite la première partie de l’Espadon à être repeinte, dont son nom qui reprend sa couleur rouge vif.
Inventorié dans les collections de l’Écomusée, le sous-marin bénéficie de la protection de l’appellation Musée de France. Ce statut apporte aussi des obligations, dont celle de faire appel à des experts habilités par l’État pour sa restauration. Pendant une semaine, six experts-restaurateurs scrutent le moindre recoin du sous-marin Espadon pour établir un constat d’état global et définir des priorités d’intervention du chantier de restauration.
Profitant de l’échafaudage, l’équipe de la conservation grimpe le long de massif pour atteindre les feux de signalisation du sous-marin. Encrassées, les onze vitres des feux sont nettoyées pour leur redonner leur transparence d’origine.
Le sous-marin étant ouvert à la visite depuis trois décennies, des insectes se sont invités à bord parmi les visiteurs. Ces petits intrus font parfois de gros dégâts, mangeant le papier et les textiles. De nombreux objets sont sortis du sous-marin et envoyés en anoxie. Un procédé de traitement sans insecticide qui consiste à les placer dans une bulle étanche et à priver l’air d’oxygène.
Sur les conseils des experts-restaurateurs, l’équipe de la conservation s’attèle au décollement de l’ancienne signalétique du parcours : sens de circulation, informations diverses… Ces ajouts, collés à même les meubles, les parois et les machines, ne correspondent plus aux normes de conservation actuelles. Ils doivent être retirés méticuleusement pour ne pas aggraver les atteintes faites par la colle.
L’équipe d’experts-restaurateurs est de retour à bord du sous-marin Espadon pour continuer sa restauration. Pendant une semaine, chacun intervient sur les priorités repérées au mois d’avril dans son domaine de spécialité : traitement des cuirs, reprise des formicas, retouche des peintures, stabilisation de la corrosion intérieure, consolidation des revêtements en skaï…
Les ateliers David montent une nouvelle structure métallique imaginée par Aurélien Raveneau et Céline Clément, architectes-maîtres d’œuvres du chantier. Elle obscurcit l’intérieur de l’écluse et permettra la projection de vidéos et d’un jeu de lumières immersif qui mettront en valeur l’Espadon.
Après être passés sur la passerelle qui frôle la proue du sous-marin, les visiteurs pourront maintenant marcher sur l’eau ! Un ponton flottant est posé sur toute la longueur bâbord. Un point de vue impressionnant sur toute la hauteur du massif.
La réouverture se rapproche à grands pas. Le nouveau matériel d’accompagnement à la visite est testé et installé par les équipes. Grâce à un déclenchement automatique des contenus, le visiteur a les mains libres durant la totalité du parcours et n’a plus qu’à se laisser porter par le commentaire.
Adieu la lumière orangée dans l’écluse fortifiée ! De nouveaux projecteurs lumineux sont installés en hauteur et au-dessus de l’eau. Dynamique, la lumière varie pour évoquer l’ambiance de la mission polaire. Cette mise en scène est accompagnée du bip régulier du sonar et d’une vidéo de contextualisation qui projette sur le mur de l’écluse des images d’archives inédites.
La dernière étape du carénage est en cours. La peinture noire qui recouvre le sous-marin n’a pas été choisie au hasard, il s’agit de celle utilisée par la Marine nationale pour ses sous-marins. Deux couches successives sont appliquées, au rouleau et au pistolet pour une étanchéité à toute épreuve.
Pour éviter un goutte-à-goutte qui affaiblirait la coque, deux cordistes interviennent sur le plafond de l’écluse fortifiée pour parfaire son étanchéité. Une opération impressionnante !
Le sous-marin est un lieu de visite difficile d’accès à cause de ses espaces étriqués, ses marches et ses nombreux pas de portes. Dans une volonté d’inclusion, le nouveau parcours prévoit un espace dédié aux publics empêchés qui donne accès à un point de vue privilégié. Doté d’un casque et d’une tablette, le visiteur parcourt virtuellement le sous-marin tout en restant en contact audio et vidéo permanent avec ses accompagnants.
C’est l’ouverture des portes tant attendue par le public. Les visiteurs se pressent pour découvrir le nouveau parcours qui les attend. Basée sur la mission dans les glaces de l’Arctique réalisée en 1964, l’expérience a été entièrement repensée : sons et lumières, projection, nouveau récit, passerelle, ponton flottant et enfin l’exiguïté des espaces intérieurs restaurés.