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Cahier de recettes du chef Gaston Magrin

Repéré par l’Écomusée de Saint-Nazaire lors d’une vente aux enchères, ce cahier de recettes d’apparence modeste se révèle être un document exceptionnel. Acquis en 2021, il est aujourd’hui conservé dans les collections du musée et offre un délicieux aperçu de la gastronomie à bord des paquebots de la Compagnie Générale Transatlantique.

Du café de la Mairie de Besançon aux cuisines de Normandie, une odyssée gastronomique

Né en 1895 en Franche-Comté de parents restaurateurs, Gaston Magrin a baigné toute sa vie dans le milieu de la gastronomie. Après un apprentissage commencé à 14 ans, il gravit rapidement les échelons à terre en passant par le restaurant des Ambassadeurs à Paris, puis en mer sur les paquebots de la Compagnie Générale Transatlantique à partir de 1922. À 40 ans, il devient le chef renommé du plus prestigieux navire français, le paquebot Normandie (1935). Son talent et son exigence marquent durablement la haute cuisine française et lui valent de recevoir la Légion d’honneur. Sa réputation dépasse largement les frontières nationales. Il est alors considéré aux États-Unis comme l’un des plus grands chefs français.

Durant sa carrière, il effectue 780 traversées transatlantiques à bord des plus célèbres paquebots de la compagnie : France (1912), Paris (1921), Ile-de-France (1927), Normandie (1935), De Grasse (1947), Liberté (1950) …

Des cuisiniers sont dans la cuisine principale du paquebot Normandie (1935), en mai 1935.

Le cahier de recettes de Gaston Magrin, recueil des secrets d’un chef

Particulièrement épais, ce gros cahier comporte 157 pages manuscrites rédigées par le chef Magrin lui-même. L’évolution du style d’écriture au fil des pages et les notes parfois personnelles qui s’y trouvent semblent indiquer qu’il a été son fidèle compagnon de traversée pendant de nombreuses années.

Dans les premières pages, l’écriture est très appliquée, presque scolaire, et liste sur 18 pages, desserts et entremets. Il est possible d’y lire une volonté d’approfondir la pâtisserie, sphère culinaire complexe, peu couverte lors des années d’apprentissage. En tout, ce sont 82 pages qui sont uniquement dédiées au sucré !

Si la couverture évoque un « cahier de menus », la réalité de ce qu’il contient est autre. Seulement deux menus sont rédigés par le chef pour une occasion exceptionnelle. Il s’agit plutôt d’un ensemble de listes de plats sucrés et salés ainsi que de très nombreuses recettes. Véritable trésor qui nous projette dans le luxe et la diversité culinaire de la table des passagers de première classe lors des traversées transatlantiques. Il témoigne de la mise en avant de la tradition culinaire française à bord des paquebots de la Compagnie Générale Transatlantique.

Pages intérieures d’un cahier de recettes ayant appartenu au chef Gaston Magrin.

À la table du chef Gaston Magrin

Les recettes sont souvent rédigées sur une double-page, avec le titre, les ingrédients et les proportions d’un côté et les étapes de préparation de l’autre. À travers les noms des plats, c’est tout un voyage culinaire qui attend le passager. Les références sont multiples : poétiques, exotiques, historiques… Délicieux, Mignon, Oriental, Périgord, Guillaume Tell, Traviata, Louis XVI… Elles sont aussi ancrées dans l’actualité, à l’image du Cœur sensible d’Yvonne Printemps, actrice, chanteuse d’opéra et de music-hall particulièrement populaire dans l’entre-deux-guerres et dont la vie amoureuse a souvent animé la presse à scandales.

Des chapitres sont consacrés aux spécialités culinaires régionales et témoignent des recherches du chef :

  • Bretagne : petits homards de Camaret à l’Armoricaine, coquilles Saint-Jacques à la Paimpolaise, brochet au beurre blanc nantais…
  • Dauphiné : poulet sauté du Relais Joyeux, poulet du pays des Gourmets…
  • Pays basque : jambon de Bayonne, piperade basque, poule farcie Henri IV…

Sans oublier la Normandie, en hommage au port d’attache des paquebots de la célèbre ligne Le Havre-Southampton-New York et au paquebot éponyme dont il sera le chef incontesté. Moules de Villerville en hors d’œuvre, sole à la Havraise, Demoiselles de Cherbourg chez elles, poularde à la crème comme en vallée d’Auge, bas-rond (ou Baron) des prés salés à la mode de l’Avranchin, pommes viroises, croissants briochés de Lisieux …

Cette ressource a été rédigée en collaboration avec Jean-Baptiste Schneider, docteur en Histoire contemporaine de l’université Le Havre-Normandie.

L’intégralité du cahier de recettes du chef Gaston Magrin a été numérisé et est consultable sur le portail des collections des musées de Saint-Nazaire en cliquant sur l’image ci-dessous.