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L’évasion du Jean Bart

18 Juin 2021

Le 18 juin 1940, alors que les troupes allemandes sont aux portes de Nantes, la construction du Jean Bart n’est pas achevée. Il ne reste qu’une nuit au cuirassé pour fuir Saint-Nazaire… Une évasion spectaculaire !

Maquette du bâtiment de ligne Jean Bart, exposée à l’Écomusée de Saint-Nazaire.

Une construction nazairienne contre la montre

Dans les années 1930, les relations européennes sont tendues. Une course à l’armement naval s’engage entre la France et l’Angleterre d’un côté, l’Allemagne et l’Italie de l’autre. Année après année, chacun enfreint les traités de Washington et de Londres sur la limitation des armements navals. La guerre approche.

En France, la menace est prise au sérieux. Dans l’entre-deux-guerres, la quasi-totalité de la flotte est renouvelée : cuirassés, contre-torpilleurs, torpilleurs, sous-marins, avisos dragueurs de mines… Alors que les Italiens mettent en chantier deux énormes bâtiments de 35 000 tonnes, les Français répliquent avec la commande d’une nouvelle série de cuirassé équivalente : la classe Richelieu.

Apparu au milieu du 19e siècle, le cuirassé est un navire de guerre symbole de pouvoir et de domination navale. Il est composé d’une coque blindée, de tourelles de tir mobiles et d’une artillerie puissante.

Alors que le Richelieu se construit à l’arsenal de Brest, la construction du Jean Bart, deuxième de la série, commence aux Ateliers et Chantiers de la Loire de Saint-Nazaire en décembre 1936. Le chantier de Penhoët voisin participe lui aussi à cet ambitieux projet. Le 6 mars 1940, le navire est mis à flot pour son achèvement dans la forme de construction qui prendra son nom. La France est en guerre depuis 6 mois déjà.

Montage de la coque du cuirassé Jean Bart le 1er septembre 1937. Montage des bordes du cuirassé Jean Bart le 6 avril 1938.
Montage des superstructures du cuirassé Jean Bart le 28 février 1939. Translation du cuirassé Jean Bart dans la souille profonde pour son achèvement à flot, le 6 mars 1940.

Le cuirassé Jean Bart sous surveillance militaire avant son évasion.

Le cuirassé Jean Bart, héros d’une incroyable évasion

En mai 1940, l’Allemagne lance une grande offensive contre la Belgique, le Luxembourg et les Pays-Bas. Les frontières sont menacées. En quelques semaines, c’est l’invasion. Les troupes ennemies se rapprochent à grands pas de Nantes.

Fleuron de la Marine française, le navire doit échapper aux mains de l’ennemi à tout prix. Il doit quitter Saint-Nazaire. Les chantiers accélèrent sa construction. Pendant un mois, 3 500 ouvriers se relaient jour et nuit. La tranchée devant permettre sa sortie jusqu’à l’estuaire fait l’objet d’un creusement acharné. Sans elle, pas d’évasion. À la mi-juin, l’équipage est sur place sous les ordres du commandant Pierre-Jean Ronarc’h.

Le 18 juin 1940, tout s’accélère. Le compas gyroscopique, instrument de navigation indispensable, est livré à 19h. La mer sera haute le lendemain matin à 4h. Cette courte fenêtre est la seule chance de sortie. Les remorqueurs de la Compagnie Générale Transatlantique et les pilotes de Loire sont prêts. L’ordre est de gagner le Maroc. À l’équipage de 375 marins et aux trois douzaines de soldats territoriaux s’ajoutent 159 ouvriers réquisitionnés pour parachever le navire pendant le voyage. À peine sorti de son sas, il s’échoue à deux reprises puis ressort miraculeusement indemne d’une attaque de bombardiers allemands.

Le cuirassé atteint Casablanca le 22 juin, entier. Une légende est née.

Le dernier des cuirassés

Malgré cette fuite héroïque, le Jean Bart est de nouveau attaqué à son arrivée dans le port marocain. Cette fois, l’agresseur n’est pas allemand mais américain. Les Alliés, redoutant que la France ne livre sa flotte à l’ennemi, préfèrent la bombarder. Il faut attendre la Libération pour que le cuirassé rejoigne Brest pour être enfin achevé. En 1953, sa mise en service officielle sonne faux, le Jean Bart est déjà obsolète face à l’avènement des nouveaux géants des mers militaires : les porte-avions. Placé en réserve après avoir seulement servi quatre ans, il est désarmé en 1970.

Le cuirassé Jean Bart à quai à Brest après-guerre.

Un documentaire réalisé par des collégiens

Au collège Pierre Norange de Saint-Nazaire, les élèves de la classe défense et sécurité globale ont travaillé sur la Seconde Guerre mondiale et ses répercussions locales. Avec l’association Les Pieds dans le PAF et en partenariat avec le ministère des Armées et le ministère de l’Éducation nationale, ils ont produit un documentaire de 7 minutes monté avec des vidéos d’archives. Ce projet de recherche et de réalisation cinématographique leur a également permis d’échanger avec Gérald Morillas, officier de marine et président de l’Amicale des Marins et Marins Anciens Combattants de la Côte d’Amour.